Cornegidouille, Père Ubu ne veut plus dire le mot ! Las d’être roi, il se fait esclave. Despote entravé par les fers, il tuera quand même à tour de bras, entraînant au passage l’aliénation volontaire des «Hommes libres», avant de finir sur une galère l’emportant n’importe où, mais ailleurs ! En s’emparant de ce chef-d’oeuvre ’pataphysique, Dan Jemmett offre à Éric Cantona un rôle à sa (dé)mesure.

Dan Jemmett commence sa carrière dans les rues de Londres. Jeune comédien, il joue Punch et Judy avec des pantins. Et entre deux représentations, il lit Ubu.

Petit à petit les aventures de Punch, étranglant son enfant et assassinant à coups de gourdins sa femme Judy, se mêlent à celles du capitaine des dragons, officier de confiance du roi Venceslas, décoré de l’ordre de l’Aigle rouge, ancien roi d’Aragon, comte de Sandomir, puis roi de Pologne et grand-maître de l’ordre de la Gidouille.

Il faudra attendre 1995 pour que les rêves d’adolescent du metteur en scène britannique prennent forme. Dan Jemmett crée alors son premier spectacle, et c’est Ubu Roi.

Seize ans plus tard, cet artiste iconoclaste, aux mises en scène ludiques et électriques, monte le troisième volet de la tétralogie consacré à ce personnage unique dans l’histoire du théâtre.

D’ailleurs, pour mieux souligner la filiation entre les deux pièces, Dan Jemmett reprend le même procédé scénique : trois castelets un peu bancals abritant Père Ubu (Éric Cantona), Mère Ubu (Valérie Crouzet) et un conteur (Giovanni Calò), écho au «Professeur», nom donné aux marionnettistes de rue anglais.

Sous leurs doigts, des objets du quotidien, simples ustensiles, s’animent dans un mouvement quasi chorégraphique ni sérieux, ni psychologique, et deviennent les accessoires magnifiques du plus pur plaisir de jouer.

«Il y a déjà quelque chose de libéré dans la manipulation des objets. On ne peut pas changer la forme d’une poivrière. Mais on peut libérer l’objet de sa forme avec une forte imagination», dit-il à ce sujet.

Celui qui pense que l’on doit «faire du théâtre de rien», érige ce principe en ciment d’une esthétique qui approche l’illusion par la réalité. Et si la ’pataphysique est la science des solutions imaginaires, le théâtre de Dan Jemmett en est alors sa plus fidèle démonstration. Elle rappelle que le personnage d’Ubu est né d’une farce de potache annonçant le surréalisme, et fait sienne la théorie de Bergson selon laquelle l’homme est «un animal qui rit» mais aussi «un animal dont on rit».

Production Compagnie des Petites Heures, Comité des Fêtes Coproduction Phénix Valenciennes, Théâtre de Namur, Théâtre de Carouge-Atelier de Genève, Théâtre du Gymnase–Marseille, Théâtre Liberté–Toulon, Archipel–Perpignan, Quartz–Brest Coréalisation Athénée Théâtre Louis-Jouvet

Les représentations de ce spectacle bénéficient du soutien de Genève Aéroport, de JT International SA et de la Banque Wegelin & Co.