Avant une tournée francophone, L’École des femmes revient salle François-Simon. Une course effrénée en cinq actes dans laquelle, en dépit de tous, Arnolphe tente d’étouffer les sentiments qu’éprouve Agnès pour qui il a tant investi. Quand la créature se retourne contre son créateur…

Dressé à jardin : un immense arbre mort et dans ses branches, la cabane-prison d’Agnès. C’est là qu’à peine sortie du couvent, la jeune femme se retrouve soumise au bon vouloir de son tuteur, Arnolphe.

Il la veut sotte car, pense-t-il, elle n’en sera que meilleure épouse. Las ! C’était sans compter sur l’indépendance de l’amour. Et quand Agnès, plus naïve que stupide, voit passer le jeune Horace, c’est leur vie à tous qui déraille.

On ne badine pas avec l’amour, Les Caprices de Marianne, Le Jeu de l’amour et du hasard et bientôt Figaro ! : au fil de ses réactualisations d’oeuvres du répertoire, Jean Liermier semble avoir choisi de faire des coups de théâtre de la vie la matière même de ses mises en scène.

Renouant chaque fois avec l’intemporalité suggérée par les textes qu’il monte, l’actuel directeur du Théâtre de Carouge donne ici une lecture épurée et une dimension visuelle nouvelle à ce chef-d’oeuvre de Molière.

L’image révélant parfois avec fracas ce que le texte dit à demi-mot. On se souviendra longtemps de la redoutable scène de la promenade : « Quelle nouvelle ? – Le petit chat est mort. »

Une réplique qui prend tout son sens alors que l’on vient de voir une Agnès sortant de sa cage, prendre son élan et, toutes griffes dehors, se jeter bras ouverts dans une course folle, respirer à pleins poumons l’air de la liberté qu’elle ne connaît pas mais vers lequel son instinct la guide.

L’image est aussi pour Jean Liermier un moyen de faire entrer le théâtre dans le théâtre, faisant de la machinerie une actrice à part entière. Ainsi du rideau, inféodé à Arnolphe,  qui se tient au garde-à-vous à chacun de ses claquements de doigt, symptôme de son obsessionnel et maladif désir de contrôle.

Un pendrillon mobile qui finira par prendre sa revanche au moment de l’effondrement final des voiles qui tendaient la scène de bleu ciel, plongeant définitivement l’homme, désormais seul, dans la brume de son destin.

Production Théâtre de Carouge-Atelier de Genève
Ce spectacle est réalisé avec le soutien de la Fondation Leenaards et de la Banque Wegelin & Co.