Vingt ans après une première rencontre, Jean Liermier retrouve Antigone de Sophocle, dans la traduction de l'helléniste vaudois André Bonnard. Une tragédie à l'avant-poste du combat pour la vie, où le respect des morts affronte la suprématie du pouvoir des vivants.

Étéocle et son frère Polynice ont reçu d'Œdipe, leur père, le royaume de Thèbes en héritage. À condition qu'ils règnent tous les deux en alternance. Pourtant, au moment de céder son tour, Étéocle refuse de rendre le pouvoir. Polynice décide de lever une armée. Les deux frères finiront par s'entretuer.

Leur oncle Créon prend alors les rênes de la cité grecque et rend son premier arbitrage : laisser sans sépulture Polynice, l'ennemi de la nation qui s'est attaqué à la ville, et honorer la mémoire d'Étéocle, reconnu comme ami et protecteur de la Cité.

Un manichéisme qu'Antigone n'accepte pas. Considérant que ses frères sont égaux devant la mort, elle affrontera au prix de sa vie les lois des hommes.

Pour Jean Liermier, le choc est frontal entre Créon " aveuglé par son orgueil " et Antigone " blessée dans sa chair par la mort de ses frères ". Les deux êtres s'opposent et leurs points de vue, radicaux, sont inconciliables.

Même s'il pense qu' " il n'y a pas qu'une vérité " dans cette oeuvre, le directeur du Théâtre de Carouge décide d'en éclairer un aspect fondamental en suivant Créon pas à pas : " C'est Créon qui subit de plein fouet cette brutale initiation au pouvoir et donne à la pièce sa dimension initiatique ", remarque-t-il. Avant de préciser : " car finalement, ce que dit Sophocle à travers ce personnage, c'est que l'humain est faible au point de rendre lui-même sa condition tragique. "

Les dieux sont en nous, voilà peut-être le sens profond de cette tragédie de l'homme élevée au rang de mythe, magnifiée ici par la langue du traducteur-poète André Bonnard.

Production Théâtre de Carouge-Atelier de Genève
Ce spectacle est réalisé avec le soutien de
Notenstein Banque Privée SA